Page:Rachilde - À mort, 1886.djvu/145

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tesse, j’ai une excellente opinion de vous. Puisque vous êtes en colère, c’est qu’il y a lieu de l’être… et je suis prêt à vous donner toutes les explications possibles… Asseyez-vous, calmez-vous… je vous écouterai, je vous le jure, malgré votre étrange préambule.

Jean s’affaissa sur un canapé. Il avait eu toutes les peines du monde à proférer ses premiers mots. Il écumait. Durant une minute, il détourna la tête et examina le salon afin de ne pas sauter tout de suite au collet de Maxime.

« Mais il sait donc tout ? » se demanda celui-ci désorienté. Il fallait conclure qu’elle lui avait tout raconté, chose presque inadmissible.

Le salon du comte était d’aspect grave, entièrement enveloppé de drap brun fleurdelisé de noir. De bons tableaux s’encadraient dans une sombre bordure d’ébène, et tous les meubles, du même bois, avaient la forme austère des meubles de style Henri II.

Une seule note un peu gaie semblait affirmer les vingt-cinq ans du propriétaire : c’était, sur une lourde console de marbre italien, un cornet d’or et d’ivoire, élancé, grand comme une trompette d’archange, tout rempli de fleurs fraîches : des roses, des lilas blancs, des jasmins, des jacinthes, et cela embaumait l’atmosphère autour des deux hommes.

Maxime prit un cigare dans une boîte ouverte, l’alluma, puis il dit, un peu ironique :

— Je ne vous en offre pas… vous penseriez que