Page:Rachilde - L’Hôtel du grand veneur, 1922.djvu/158

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vous la bonne opinion que j’ai de votre cœur ? C’est dans le cœur que se trouvent toutes les sciences.

Et le supplice commença. Mais comme il suivait, en véritable chasseur à l’affût, tous ses gestes à elle et guettait son sourire ; comme il s’éprenait de plus en plus de la forme de son aventure sans trop se souvenir de la vulgarité du fond où tendait sa nature de rustre, il fut adroit, ne brisa rien et, tout à coup, sa gaîté, sa jeunesse d’être libre lui revenant, il fit résolument le bond dans l’inconnu et s’écria :

— Pas si sot, madame, que d’essayer de me réveiller… puisque vous voulez que je rêve.

— C’est cela. Rêvons ! Ça nous changera de misère tous les deux. Prenez la mienne qui est la plus pauvre en beaux songes et donnez-moi la vôtre, la plus fertile en histoires — de brigands ! Racontez-moi comment on devient braconnier… je vous en prie.

— Ça vous intéresse ? Si je dis des bêtises, vous me reprendrez, n’est-ce pas ? je serais si malheureux, maintenant, de vous déplaire. Vous voulez savoir quoi ? Comment je suis devenu un… brigand ? Eh bien, allons-y ! Cette sale garce de mère Fonteau est ma logeuse,