Page:Rachilde - L’Hôtel du grand veneur, 1922.djvu/167

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

plètement gris. Je ne sais pas si j’ai tort ou raison de continuer, mais j’ai les pieds attachés. Je sens que je prends racine sur la terre qui vous porte. Chassez-moi donc si vous voulez que je m’en aille. Vous m’en avez fait dire plus que je n’en ai jamais dit à aucune femme… et je ne suis pourtant pas amoureux de vous.

— Alors, fit la duchesse, dissimulant un sourire, qu’est-ce que ça pourrait bien devenir… si vous l’étiez ?

— Je ne me le demande pas, fit-il, regardant attentivement la lame de son couteau d’argent. Je n’ai jamais rien compris à ces histoires-là, vraies ou pas vraies. Je ne suis pourtant pas un idiot. Je sais lire, écrire et compter, j’ai même du plaisir à suivre les feuilles où l’on en raconte, mais… que ça m’arrive… ça non. L’amour c’est…

Elle attendit un instant. Il cherchait le mot poli, ne le trouvait pas du tout dans son vocabulaire d’homme du peuple et comme, en outre, les finesses de l’argot parisien étaient complètement étrangères à son tempérament de sauvage, il hésitait à lui paraître grossier.

— J’aurais bien su en entrant ici… car, je