Page:Rachilde - L’heure sexuelle, 1900.djvu/31

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— … Il faut me laisser dire, vois-tu, car je suis le plus doux de tous les hommes. Je n’ai jamais pu avouer ces choses aux autres femmes qui abuseraient de ma faiblesse. Je me confie à toi que j’ignore. Je me suis gardé de tes… sœurs, ne leur donnant que le moins bon de ma personne. Je les aime toutes ici, en une qui a tes yeux. Elle est morte, j’ai mis des siècles à devenir fou et je n’exige pas que ma folie soit contagieuse. Je t’ai rencontrée… je suis heureux de t’avoir vue. Non, pas les petites cuisines… il y manquerait le piment, le seul piment de ma foi ou de la tienne. Nous ne pouvons pas nous aimer. On ne remonte pas les marches du trône quand on est descendu jusqu’où tu es ! je suis venu ici pour coucher avec tes yeux… Suppose un voyageur qui aurait la science de voir par tes prunelles noires la prostitution du monde entier. Oh ! tes yeux ! Ne baisse pas ainsi les paupières : on dirait des jupes qui tombent ! Tes yeux divins et sacrilèges, tes yeux qui sont grands comme des alcôves tendues de tout le velours des nuits de passion. Quelqu’un t’a-t-il dit que tu avais des yeux ? Quelqu’un t’a-t-il dit que tu