Page:Rachilde - La Marquise de Sade, 1887.djvu/67

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— Cordieu ! s’écria Daniel Barbe, exaspéré depuis son départ de Clermont, je veux ce logement et je l’aurai. Est-ce qu’un colonel est un simple pioupiou qu’on peut envoyer se promener ailleurs ? Attends ! je vais vous la forcer la vieille machine, moi.

Et endossant son plus beau dolman, bouclant un ceinturon neuf, le colonel du 8e, malgré les supplications de Caroline, les haussements d’épaules de Tulotte, sans savoir même si cela lui conviendrait, partit à la conquête de la maison espagnole. Rue de la Gendarmerie on le fit pénétrer sous une porte cochère où s’ébattaient les vents les moins favorables ; il aperçut une Notre-Dame dans une niche, puis une cour étroite avec des écuries au fond et une corbeille de fuchsias de toutes nuances au milieu. C’était propre, sévère, un peu monacal, mais on serait tranquille. Il dut monter un escalier tournant tout de pierre grise, son uniforme détonnait là-dedans comme un coup de clairon en plein sommeil de religieuses. On le fit entrer dans un salon désert, on referma une porte, et il resta seul pendant une demi-heure.

Ce salon était octogone, orné de portraits rébarbatifs : des conseillers au Parlement, des échevins, des abbesses, et un pastel de jeune fille vêtue d’une sorte de linceul. Toujours des grilles aux fenêtres et toujours des fuchsias derrière ces grilles.

Les carreaux de vitre étaient larges d’une main, avec des teintes vertes qui faisaient des transpa-