Page:Rachilde - La Marquise de Sade, 1887.djvu/75

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vert, se dressaient des chaises datant de la reine Berthe avec des dossiers en rosaces de cathédrales. Toutes ces vieilles superbes choses remises aux lumières d’un gala rutilaient de paillettes multicolores ; les étoffes avaient des plis cassés à faire damner un Velasquez ; les armes semblaient couvertes de pierres précieuses.

Le colonel ne s’attendait pas du tout à cela, d’ordinaire Caroline n’allumait qu’une lampe, ses yeux fatigués ne pouvant tolérer l’éclat des bougies, et puis, il était si honteux d’avoir obtenu par la force « une ratière » qu’il n’insistait pas.

— Alors !… qu’en dites-vous ? demanda-t-il pris d’une secrète vanité.

— Mais, mon colonel, c’est un palais ! cria de Courtoisier ; il y a des millions dans cette seule pièce, et vous avez loué cela, tout meublé, huit cents francs ?

— Ma foi, oui… je crois que notre dévote est une simple sorcière.

— Une sorcière ?… une vieille folle ! exclama Corcette ébouriffé, pourquoi laisse-t-elle ces objets de prix se manger aux vers ? C’est moi qui bazarderais la moitié de l’appartement !

Jacquiat était du même avis. On parla de faire venir madame Barbe déjà couchée, mais Tulotte affirma qu’elle en deviendrait plus malade. Mary, assise sur une des chaises de la reine Berthe, le bras enfoncé dans un coussin d’Orient, regardait de toutes ses prunelles, chercheuses d’inconnu, serrant sa