Page:Rachilde - Les Hors nature, 1897.djvu/142

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— Je comprends, je comprends, s’esclaffa-t-il, le vieil instinct de séminariste qui se réveille ! j’ai un air d’église qui froisse tes dernières convictions religieuses ? La mascarade monte sur l’autel et ça te vexe ! Parbleu ! (Il se campa devant lui, déployant d’un coup de pied savant la traîne de sa robe.) Salue en ma personne de chair et d’os la pieuse Irène, princesse de Byzance, portant son impérial costume de cour d’après une estampe extrêmement curieuse qui pourrait être un portrait. Cette estampe est si nette qu’elle m’a permis de reproduire les moindres détails de la dalmatique et de donner l’équivalent des nuances d’étoffes. Sauf les bijoux, soustraits au trésor de maman, toute la parure : diadème, colliers, ceinture et chapelets, a été reconstituée d’après mes instructions. Tout est lourd, violent, et cependant d’une merveilleuse perversité de tons. Ces améthystes et ces rubis, répercutant les couleurs de la dalmatique absolument comme les étincelles d’un feu de joie répercuteraient les flammes de l’enfer, n’est-ce pas prodigieux ? Je pouvais me munir d’une longue chevelure brune, plus en harmonie, mais j’ai préféré me montrer nature, me servir de mes cheveux qui sont fort présentables, teints en roux. Puis… regarde !… des brodequins cramoisis bordés d’hermine, avec boucle de diamants, des vrais, je n’ai pas une pierre fausse ! Quant aux dessous : jupes de Valenciennes blondes pour fondre les perspectives (il retroussa sa robe jusqu’aux cuisses exhibant des jambes d’un irréprochable modelé) ; et maillot de soie jaune, s’il te plaît !… À propos de maillot, la pre-