Page:Rachilde - Les Hors nature, 1897.djvu/297

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dre le feu de leurs discours par notre sagesse. Moi, je vais m’habiller pour les recevoir… tu verras, je leur présenterai un de Fertzen qu’ils ignorent, les bons petits singes.

Et il s’échappa des bras de son aîné, tout pâle de colère.

— Les gens du village ? Ah ! ils choisissent bien leur heure ! Où sont les énergies d’antan, mon Dieu ? Mourir ? Le tuer ? Je ne comprends plus… sinon que j’ai presque envie de renvoyer la fille qui le tourmente. La jalousie, c’est tellement douloureux.

Accablé, Reutler se jeta dans un fauteuil.

— Le maire de Rocheuse demande à parler à Monsieur le baron, dit le second valet de chambre soulevant une portière.

— Faites entrer, murmura Reutler, et redressez tous les stores, on n’y voit pas, ici, je veux y voir clair, entendez-vous !

Monsieur Joviot entra, d’un pas ferme. Il était vêtu d’une blouse bleue, très raide, et s’épongeait la figure, car il avait marché trop militairement le long de la côte. Le musicien suivait, sa clarinette à la main, et, derrière le musicien, le forgeron, deux conseillers municipaux, très rouges et très solennels. Il se rangèrent en demi-cercle, le maire toussa. Reutler s’était avancé vers eux. Sa haute taille droite les dominait, mais il inclinait la tête avec politesse. On ne visitait pas les louveteaux de Rocheuse sans une raison grave, ou le besoin d’une aumône. Vraiment, il se sentait disposé à leur donner tout son or pour se débarrasser d’eux !

— Monsieur le baron de Fertzen, commença le