Page:Rachilde - Les Hors nature, 1897.djvu/316

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fut brisée sur ses épaules, d’une esquille du bois se déchirant dans la peau et perforant les plaies bleuâtres !… Ah ! On disait que c’était fini… que rien ne marquerait. Allons donc ! Cela recommençait tous les jours, au moins pour le bourreau !…

Dehors, la campagne demeurait tranquille. Les moissons ondulaient sous une brise chaude qui les séparait, les épandait comme des chevelures.

Quelqu’un entra dans la serre d’un pas ferme, très égal. Le médecin, que Reutler avait totalement oublié.

— Monsieur, dit celui-ci avec un bon visage d’homme vulgaire, vous m’avez fait demander et j’en suis bien aise. Notre malade n’est pas raisonnable. Ou plutôt sa maladie est en train de changer de cours…

— Il n’est pas guéri ? fit Reutler, en blêmissant. Pourquoi disiez-vous le contraire, Monsieur ?

— Soyez calme, répondit le docteur de son accent jovial, très désagréable, car il était irrémédiablement gai. Votre joli cadet joue à la petite maîtresse, Monsieur de Fertzen. Il se porte comme vous et moi, seulement, il ne veut pas quitter ses appartements. Il devient monomane, comprenez-vous ? L’air de certaines chambres luxueuses est malsain pour les jeunes gens un peu infatués de leurs qualités physiques…

— Je ne comprends pas, dit Reutler s’adossant au vitrage de la serre qui craqua sous le poids de sa haute taille.

— Vous tenez à ce que je vous mette les points sur les i ? Entre gens de même métier, le secret professionnel n’existe plus. Je pense que vous