Page:Rachilde - Les Hors nature, 1897.djvu/368

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

que tu viens me demander la réalisation d’un caprice.

Éric alluma une cigarette, tranquillement.

— J’ai plus de caprice… du moment que je connais le moyen de violer les femmes. Reutler, je te livre le système, en attendant que je le fasse breveter… Tiens-toi bien, mon grand : quand on a des intentions… et pas de ressort, on s’arrange de façon à ce que la jeune personne ait les cheveux verts… Alors !… Oh ! alors… (Il lui envoya un baiser et se révulsa les yeux.)

Reutler perdit patience.

— Je t’en prie, Éric, si tu as toujours vingt ans, saute… avant que je ne te force à descendre…

— Tu rends le revolver ?.

— Non !… J’ai assez de cette comédie.

— Gare ! je vais me jeter dans tes bras…

Et il s’y lança, gaiement. Reutler reçut une commotion terrible. Il referma les bras et se laissa ceinturer par ceux d’Éric.

— Je le tiens, ton joujou qui tue… pas besoin de me le rendre ! Tu n’es pas malin, l’hercule, de te laisser désarmer par un petit garçon !… Maintenant, viens causer… je te dis que mon histoire est extraordinaire…

Il l’entraîna vers le canapé.

Reutler eut la sensation douloureuse d’être tout-à-coup chargé de chaînes. Il balbutia :

— Éric ! mon pauvre Éric, je ne veux pas te tuer, je t’assure… Quelles ridicules plaisanteries ?… Ce revolver est pour moi la superstition de la liberté, rien de plus… Tu es donc lâche… Voyons… tu as donc peur de moi, c’est bien réel ? Ah ! si je te