Page:Rachilde - Refaire l’amour, 1928.djvu/20

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chalante noblesse des paresses italiennes. Il est sûrement Italien et ces gens-là sont modèles de naissance.

Faiseur d’images, sans cesse sollicité par l’aventure du geste, de la nuance, de l’expression rencontrée qui me saisit encore plus que je ne peux la saisir, mon atelier c’est la rue, le salon, le théâtre, l’endroit public ou privé, partout où je peux m’emparer de la grimace humaine prise en dehors de toute pose. Ce n’est souvent qu’une ligne et ça me sert, un pour camper une figure. Je ne conçois rien selon ma perspective particulière, qui serait un tel manque de mesure que personne ne s’y attacherait. L’observation m’aide à faire prendre une fantaisie pour une réalité. C’est le levain qui gonfle l’œuvre, ou le solidifiant qui la coagule. Je ne travaille pas plus que cet ouvrier goguenard, le menton sur son outil, seulement je vois et, quand j’ai vu, je fais voir. Je suis un pauvre diable d’artisan cérébral qui entasse, dans le grenier de son cerveau, tous les grains disparates du sablier. J’amoncelle, ou je disperse, selon le vent qui souffle sur moi.

Je remets mon carnet dans ma poche, puis, à mon tour, je vais enfin passer.

Ah !…