Page:Rachilde - Refaire l’amour, 1928.djvu/21

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III

… Je vais passer ; alors j’aperçois une bouche !… C’est un éclair qui jaillit de la foule. Ce sombre nuage communique jusqu’à moi par ce trait de feu et m’illumine d’une rouge lueur. Une forme droite, mince, une femme jeune dont les vêtements ne diffèrent pas des autres vêtements féminins, de la robe courte, du manteau serré en fourreau de parapluie, du casque de satin, bien enfoncé sur les oreilles, avec une plume couchée balayant l’épaule mais cette tige humaine porte une fleur étonnante : sa bouche d’un carmin frais et naturel. sa bouche d’un dessin tellement classique, tellement la bouche qu’il faudrait à toutes les femmes (et à tous les hommes !) une bouche si voluptueusement pure que je n’hésite pas : je la suis.

L’artiste sépare encore ces lèvres ravissantes du reste de la créature inconnue. Tour à l’heure, je crains fort que l’homme envoie promener le dessinateur pour s’occuper du