Page:Racine - Œuvres, t5, éd. Mesnard, 1865.djvu/422

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comme ce peuple à qui vous avez appris à surmonter tous les obstacles, à ne plus trouver de places imprenables, a forcer les retranchements les plus inaccessibles. Quel empressement28, Sire, la postérité n’aura-t-elle point à rechercher, à recueillir les mémoires de votre vie, les chants de victoire qu’on aura mêlés à vos triomphes ? C’est ce qui nous répond du succès29 de notre ouvrage ; et s’il arrive, comme nous osons l’espérer, qu’il ait le pouvoir de fixer la langue pour toujours, ce ne sera pas tant par nos soins, que parce que30 les livres et les autres monuments qui parleront du règne de Votre Majesté feront les délices de tous les peuples, feront l’étude de tous les rois et seront toujours regardés comme faits dans le temps de la pureté du langage et dans le beau siècle de la France. Nous sommes31, avec une profonde vénération, etc.


CRITIQUE DE L’ÉPÎTRE DE CHARLES PERRAULT.

1. Le Dictionnaire de l’Académie françoise paroît enfin. — Ce mot : enfin, ne peut ici être dit qu’en deux sens : ou comme par un aveu de la lenteur de l’Académie à travailler, ou comme par une espèce de vaine complaisance d’avoir pu venir à bout d’un si grand ouvrage. Or, dans l’un comme dans l’autre sens, il est mal, parce qu’il n’est ici question ni de s’accuser, ni de se vanter.

2. Sous les auspices de Votre Majesté. — On dit bien : agir sous les auspices, entreprendre, achever quelque chose sous les auspices d’un grand prince, pour marquer que c’est par ses ordres que tout s’est fait ; que c’est son génie, son bonheur qui ont influé sur tout. Mais paroît sous les auspices ne se peut dire, à mon sens, que dans une occasion : ce seroit si un auteur, n’ayant pas voulu, par modestie, mettre un ouvrage au jour, venoit à y être excité, et comme forcé par les instances d’un grand prince ; car alors on pourroit dire, avec fondement, que cet ouvrage paroît au jour sous les auspices du prince. Mais ici il n’y a rien de semblable.

3. Et nous avons osé mettre à la tête de notre ouvrage le nom auguste. — Cette phrase : mettre le nom d’un prince à la tête d’un ouvrage, pour dire : « lui dédier un ouvrage, » me