Page:Racine - Œuvres, t5, éd. Mesnard, 1865.djvu/425

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11. Ce qui nous console. — Voilà encore un endroit où l’expression fait tort au sens ; car si l’Académie est vraiment touchée de ce qui regarde la gloire du Roi, ce ne doit pas être un sujet de consolation pour elle de ce que les autres langues ne sont pas plus capables que la nôtre de donner une juste idée des actions d’un si grand prince. On ne peut avoir raison de s’exprimer de la sorte que quand on veut laisser voir qu’on n’agit que par émulation. Mais hors de là, il est mal de dire qu’on se console de ne pouvoir pas bien faire, parce que d’autres ne peuvent pas faire mieux.

12. C’est que sur un pareil sujet les autres langues n’auroient aucun avantage sur la nôtre. — De ces deux sur, le premier est peut-être impropre ; car on ne dit pas avoir avantage sur quelqu’un sur quelque chose, mais en quelque chose. De plus, l’exactitude et la pureté du style ne souffrent pas qu’on mette dans un petit membre de période deux sur qui dépendent tous deux d’un même régime.

13. De brillant et de sublime dans leurs plus fameux panégyriques. — A prendre le mot de panégyrique dans un sens étroit, cela n’iroit pas loin. Ainsi je ne doute point que par les plus fameux panégyriques, on n’ait eu en vue tout ce que les anciens, Grecs et Romains, peuvent avoir fait de plus achevé, en matière de louanges, dans tous leurs ouvrages. Mais en même temps aussi je crois que c’est une exagération, et trop forte en elle-même, et vicieuse outre cela quant au sens et à l’expression, que de dire que ce qu’il y a de plus brillant et de plus sublime dans l’éloquence, ou grecque ou romaine, ne puisse pas avoir assez de force et assez d’éclat pour soutenir le simple récit des victoires du Roi. Le brillant, le sublime et l’éclat ne sont point faits pour soutenir, et un simple récit ne doit point être soutenu. Cela implique contradiction.

14. Qu’il nous soit permis, Sire, de détourner les yeux d’une gloire si éclatante. — Je ne blâme point cette phrase ; mais pourtant les yeux d’une gloire peuvent trouver de mauvais plaisants.

15. Le vainqueur des nations. — Pour pouvoir dire qu’un prince est le vainqueur des nations, il ne suffit pas qu’il ait été toujours victorieux dans toutes les guerres qu’il a ou entre-