Page:Racine - Œuvres, t5, éd. Mesnard, 1865.djvu/426

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prises ou soutenues contre diverses nations : il faut qu’il ait subjugué des nations entières. Or cela ne se peut pas dire du Roi, quoique ses victoires et ses conquêtes soient plus grandes et plus glorieuses par elles-mêmes que celles des princes qui ont subjugué plusieurs nations.

16. Le vengeur des rois. — Cette épithète ne convient pas non plus. Il faudroit, pour la fonder, que le Roi eût effectivement rétabli le roi d’Angleterre sur le trône. Tant qu’il ne l’y rétablit point, il est son protecteur, son appui, mais il n’est point son vengeur, le mot de vengeur supposant un homme qui non-seulement a pris quelqu’un sous sa protection, mais qui l’a effectivement vengé de ses ennemis et rétabli en son premier état.

17. Une protection si glorieuse. — La construction souffre ici ; car il ne suffit pas que, sous le terme de protecteur, celui de protection soit enfermé, pour dire ensuite absolument : une protection si glorieuse ; mais il faut nécessairement que celui même de protection ait été exprimé : ces mots : une si glorieuse, étant ici de même nature que le pronom démonstratif ce, qu’on ne peut jamais employer sans que le terme auquel il se rapporte ait été employé peu de temps auparavant, ou sans ajouter ensuite quelque chose qui marque précisément de quoi il s’agit. Ainsi, après avoir parlé de la protection dont le Roi honore l’Académie, on peut bien dire : une si haute protection. Sire. Que si on ne s’est point encore servi du mot de protection, il faudra dire : une si haute protection que celle dont vous nous honorez[1], ou quelque autre chose de semblable ; car si l’on n’ajoute rien après une si haute protection, dans un cas où le même mot n’a pas précédé, encore une fois il n’y a point de construction.

Si glorieuse. En parlant des grandes actions du Roi, c’est fort bien dit : des actions si glorieuses, parce que c’est à lui qu’elles apportent de la gloire ; mais en parlant de la protection que le Roi nous donne, comme ce n’est pas à lui, mais à

  1. La phrase proposée par l’abbé Régnier… n’est point française ; il faut dire : une aussi haute protection que celle dont vous nous honorez. (Note de d’Alembert.) — La remarque de d’Alembert est juste. Il est à noter qu’il s’exprime ici comme s’il croyait n’avoir affaire qu’à l’abbé Régnier.