Page:Radcliffe - Le confessionnal des pénitents noirs, 1916.djvu/29

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prêtre allait commencer l’exhortation accoutumée, lorsque la jeune femme écarta elle même son voile et, laissant voir un visage où la douleur était mêlée à une douceur angélique, elle leva au ciel des yeux mouillés de larmes, et fit signe qu’elle voulait parler. Ô surprise ! C’était Elena elle-même !

Elle éleva la voix :

— Je proteste, dit-elle, en présence de tous les assistants, que j’ai été traînée ici malgré moi pour prononcer des vœux que mon cœur repousse ; je proteste…

Une rumeur immense l’interrompit et, au même instant, Vivaldi s’élança vers l’autel.

Elena jeta sur lui un œil égaré, puis, frappée de saisissement, elle tomba évanouie dans les bras des religieuses qui l’entouraient. Mais celles-ci ne purent empêcher Vivaldi d’arriver jusqu’à elle. Ses angoisses en la voyant presque sans vie émurent de compassion les religieuses elles-mêmes.

Elena en reprenant ses sens, rencontra le regard de Vivaldi ; à son tour, l’expression de ses yeux lui fit comprendre qu’elle n’était pas changée pour lui. Elle demanda cependant à se retirer et, aidée par Olivia et Vivaldi, elle se préparait à quitter l’église, quand l’abbesse donna ordre que le jeune étranger lui fût envoyé. Vivaldi n’était pas disposé à obéir à cette injonction ; mais il céda aux prières d’Olivia et de son amie, et adressant à Elena un adieu qui, croyait-il, ne devait pas les séparer pour longtemps, il se rendit au parloir où l’attendait l’abbesse. Il espérait éveiller chez celle-ci des idées de justice et d’humanité ; mais il reconnut bientôt que sa tentative était inutile.

L’abbesse commença un sermon que Vivaldi écouta avec patience ; mais lorsqu’elle en vint à parler d’Elena comme d’une criminelle, le jeune homme ne cacha pas son mépris et son indignation à la prétendue sainte femme qui, par orgueil et sécheresse de cœur, violait les lois de la justice en séquestrant une orpheline qu’elle condamnait de son autorité privée à une éternelle captivité. À cette sortie imprudente, elle répondit par des menaces. Vivaldi, en la quittant, crut trouver un secours dans l’abbé digni-