Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T1.djvu/128

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teau : il étoit pourtant difficile d’y arriver. Saint-Aubert étoit trop mal pour supporter le moindre mouvement : Michel ne pouvoit pas quitter ses mules ; Emilie, qui soutenoit encore son père, craignoit de l’abandonner, et craignoit aussi de s’aventurer seule à une telle distance, sans savoir où et à qui s’adresser : il falloit pourtant prendre un parti, et sans délai. Saint-Aubert dit donc à Michel d’avancer le plus doucement possible. Au bout d’un moment il s’évanouit ; la voiture s’arrêta : il étoit sans nulle connoissance. Ô mon père, mon cher père ! crioit Emilie désespérée ; et le croyant prêt à mourir : Parlez, dites-moi un mot, que j’entende le son de votre voix. Il ne répondit rien. Épouvantée, elle dit à Michel de puiser au ruisseau voisin, elle reçut l’eau dans le chapeau de l’homme, et d’une main tremblante en jeta au visage de son père. Les rayons de la lune, qui alors donnoient sur lui, montroient l’impression de la mort : tous les mouvemens de crainte personnelle cédèrent en ce moment à une crainte dominante, et confiant Saint-Aubert à Michel, qui ne vouloit pas quitter ses mules, elle sauta à bas de la voiture pour chercher le château qu’elle avoit vu dans l’éloignement, et la musique qui