Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T2.djvu/176

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fois la parole à Emilie : ses regards exprimoient son ressentiment ; mais Emilie s’étonnoit beaucoup qu’il pût s’abstenir d’en renouveler le sujet. Elle fut encore plus surprise de voir que, pendant les trois jours, le comte ne parût pas, et que Montoni ne prononçât pas même son nom. Plusieurs conjectures s’élevèrent dans son esprit ; elle craignoit quelquefois que la querelle ne se fût renouvellée et ne fût devenue fatale au comte ; quelquefois elle penchoit à espérer que la lassitude et le dégoût avoient suivi la fermeté de son refus, et que ses projets étaient abandonnés. Enfin, elle se figuroit encore que le comte recouroit au stratagème, suspendoit ses visites, obtenoit de Montoni qu’il ne le nommât pas, dans l’espoir, que la reconnoissance et la générosité feroient tout sur elle, et détermineroient un consentement qu’il n’attendoit plus de l’amour.

Elle passoit le temps dans ces vaines conjectures, cédant tour-à-tour à l’espérance et à la crainte : Montoni se mit en route pour Miarenti, et ce jour, comme les précédens, s’écoula sans voir le comte, et sans entendre parler de lui.

Montoni s’étant décidé à ne point quitter Venise avant le soir, pour éviter les cha-