Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T6.djvu/86

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témoin étoit formée de paysans espagnols et français, habitans d’un hameau voisin. Les uns dansoient gaîment au son d’un tambourin et d’une guitare, les femmes tenoient des castagnettes ; mais la riante mélodie française ayant fait place à un genre plus sérieux, deux paysannes dansèrent une pavane espagnole.

Le comte compara ce tableau charmant avec ceux de Paris, où le faux goût défigure les traits, et dérobant les charmes de l’émotion, essaie de suppléer au brillant coloris de la nature : c’est lui qui gâte l’extérieur, pendant que le vice ternit l’âme. Le comte soupiroit en pensant que les grâces naïves, les plaisirs innocens florissoient dans la solitude, et fuyoient le concours des sociétés polies. Les ombres, qui se prolongeoient, firent enfin souvenir les voyageurs qu’ils n’avoient pas de temps à perdre ; et, quittant ce groupe joyeux, ils se remirent en chemin vers l’auberge où ils dévoient passer la nuit.

Le soleil se couchoit, et bientôt l’obscurité s’épaississant, confondit tous les objets. Blanche regardoit en silence ; elle écoutoit avec intérêt le vent murmurant entre les sapins qui couvroient les flancs des montagnes ; elle entendoit le cri de l’oiseau de