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LE BAL DU COMTE D’ORGEL

assise sur la banquette de cuir qui surmontait le garde-feu. Les paroles de François la rafraîchirent comme un envoi de fleurs sauvages. Elle ouvrit les narines, respira profondément. Elle desserra les lèvres. Tous deux parlèrent de la campagne.

François, pour jouir davantage du feu, avait approché son fauteuil, posé sa tasse de café sur la banquette où était assise Mme  d’Orgel. Anne, accroupi par terre, face à cette haute cheminée, comme devant une scène d’Opéra, se taisait aussi docilement que s’il n’eût jamais fait autre chose.

Que se passait-il ? Pour la première fois de sa vie, Anne d’Orgel était spectateur. Il goûtait leur dialogue, non pas pour ce qu’il exprimait, mais plutôt pour sa musique. Car la campagne restait lettre morte pour le comte.

Il fallait à la nature une protection royale pour qu’il lui trouvât du charme. Il ressemblait à ses ancêtres pour

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