Page:Raguey - Le Buste voilé, Roman complet no 19, 1916.djvu/37

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À la porte de la ville je voulus que mon amie me laissât seule et m’attendît à l’église de Santa Maria Novella. Les quelques centaines de pas que j’eus à faire pour arriver chez le docteur furent pour moi « la via dolorosa ». Je dus m’arrêter au moins dix fois, mes jambes refusaient de me porter. Je m’appuyais à chaque instant aux murs des palais pour ne pas tomber. Si parfois un passant étonné me regardait, je sentais comme le rouge de la honte me monter au front, et je n’osais plus avancer. Enfin j’arrivai brisée et à moitié mourante. Ajoutez à cela que j’éprouvais une terreur semblable à celle que doit avoir une personne qui se présente chez le médecin et qui craint d’être devinée. Quand ce fut mon tour de paraître devant le docteur, je lui dis tout naïvement :

— Je ne sais ce que j’ai ; mais je viens près de vous pour que vous me guérissiez.

— Mon enfant, me dit-il d’une voix pleine de commisération, les malades comme vous, je ne puis les guérir.

— C’est donc vrai que je suis condamnée ? repris-je tristement.

— La seule chose que je puisse vous conseiller c’est de prier Dieu de venir à votre aide. Combattez vos pensées, prenez des distractions, oubliez.

Oublier ! Je ne le pouvais pas. Il me fallait donc mourir. Je quittai le bon docteur,