Page:Ramayana trad Hippolyte Fauche vol1.djvu/126

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magnanimes saints, antiques rois de ta race ! Reçois, donnée par ton père, une puissance immuable, éternelle ; et, comblé d’une félicité suprême, foulant aux pieds tes ennemis vaincus, que la vue de ton bonheur fasse la joie de tes ancêtres ! »

À ces paroles de Kàauçalayâ, il répondit en ces termes, l’âme quelque peu troublée de cette douleur, où l’avaient noyée les paroles de Kêkêyi : « Mère, tu ne sais donc pas le grand malheur qui est tombé sur moi, pour la douleur amère de toi, de mon épouse et de Lakshmana ? Kêkeyi a demandé au roi son diadème pour Bharata ; et mon père, qu’elle avait enlacé d’abord avec un serment, n’a pu lui refuser son royaume. Le puissant monarque donnera l’hérédité de sa couronne à Bharata ; mais, quant à moi, il ordonne que j’aille aujourd’hui même habiter les forêts.

« J’aurai quatorze années, reine, les bois pour ma seule demeure, et loin des tables exquises, j’y ferai ma nourriture de racines et de fruits sauvages. »

Consumée par sa douleur, à ces mots de Râma, la chaste Kâauçalyâ tomba, comme un bananier tranché par le pied. Râma, voyant la malheureuse étendue sur le sol, releva sa mère consternée, défaillante, évanouie ; et, tournant autour de l’infortunée, remise en pieds, les flancs battus, comme une cavale essoufflée, il essuya de sa main la poussière dont la robe de sa mère était couverte.

Quand elle eut un peu recouvré le souffle, Kâauçalyâ, délirante de chagrin et jetant les yeux sur Râma, s’écria d’une voix que ses larmes rendaient balbutiante : « Plût au ciel, Râma, que tu ne fusses pas né mon fils, toi qui rends plus vives toutes mes douleurs, je ne sentirais pas