Page:Ramayana trad Hippolyte Fauche vol1.djvu/315

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son corps de géant. À l’instant ce noctivague Démon, frère puîné de Kouvéra, dépouillant ses placides apparences de religieux mendiant, rentra dans la hideuse réalité de son extérieur, semblable à celui de la Mort. Il avait un grand corps, de grands bras, une large poitrine, les dents du lion, les épaules du taureau, les yeux rouges, le corps bigarré et les cheveux enflammés.

Le rôdeur impur des nuits jeta ces mots à Sîtâ, parée de joyaux resplendissants, ornée des boucles noires de ses beaux cheveux, mais qui avait comme perdu le sentiment : « Femme, si tu ne veux pas de moi pour époux sous ma forme naturelle, j’emploierai la violence même pour te soumettre à ma volonté ! Puisque la vigueur de Râma, qui t’a mise en oubli, te fait ainsi te glorifier devant moi, c’est que tu n’as jamais entendu parler, je pense, de ma force sans égale ! Me tenant au sein des airs, je pourrais enlever la terre à la force de mes bras ; je pourrais même tarir l’Océan comme une coupe : je pourrais tuer la Mort, si elle combattait avec moi ! Je pourrais offusquer le soleil de mes flèches aiguës ; je pourrais fendre même la surface de la terre ! Vois donc, insensée, que je suis ton maître, que je prends à mon gré toutes les formes, et donne à qui je veux les biens que l’on désire ! »

Quand il eut ainsi parlé, Râvana, cette âme corrompue, égaré par l’amour, osa prendre Sîtâ, comme Bouddha saisit dans les cieux la brillante Rohinî[1].

Elle, baignée de larmes et pleine de colère : « Méchant, dit alors Sîtâ, tu mourras immolé par la vigueur du magnanime Râma ! Insensé, tu exhaleras bientôt avec

  1. La planète de Mercure et le 4e astérisme lunaire.