Page:Ramayana trad Hippolyte Fauche vol2.djvu/76

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la terre et sortit du champ déchiré par le soc de la charrue ; elle, qui fut produite par la poussière jaune du guéret, pareille au pollen des lotus.

« Délaissant tous ses plaisirs, entraînée par la force de sa piété conjugale, elle était, sans tenir compte des peines, entrée dans la forêt déserte. Là, contente de manger les fruits sauvages et les racines, heureuse d’obéir à son époux, elle goûtait dans les bois tout le bonheur qu’elle eût jamais goûté dans son palais. Cette princesse à la couleur d’or, qui accompagnait toutes ses paroles d’un sourire, infortunée, sans appui, elle endure ici un supplice épouvantable ! Cette magnifique robe jaune, qui brille sur elle avec la teinte de l’or, est la même que j’ai vue avec les singes ce jour qu’elle fit tomber sur la montagne son vêtement supérieur.

« Mais je veux interroger cette vertueuse Mithilienne, troublée par l’odieux Râvana, comme une fontaine par un homme altéré. Elle ne brille plus aujourd’hui, comme un lotus souillé de boue, cette femme en deuil, que le monstre aux dix têtes arracha violemment à ce lac d’Ikshwâkou ! Elle, à cause de qui Râma est tourmenté de quatre sentiments : la pitié, la tendresse, le chagrin et l’amour. À cette pensée : « Ma femme est perdue ! » sa pitié s’émeut ; « elle pense à moi ! » sa tendresse ; « épouse fidèle ! » son chagrin ; « épouse adorée ! » son amour. »

S’étant réveillé au temps opportun, le puissant monarque des Rakshasas, sa robe et ses guirlandes tombées, la tête encore échauffée par l’ivresse, tourna sa pensée vers la Vidéhaine.

Car, enchaîné fortement à Sîtâ, enivré d’amour jusqu’à la fureur, il ne pouvait cacher la passion effrénée