Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/133

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ces : mais ces mouvements de fonds ne sont que le correctif des excédents ou des déficits de la balance du commerce et ils ne doivent pas en être détachés[1].

C’est à la balance seule du commerce qu’il faut s’en prendre. Aussi est-ce bien à tort, suivant Mun, que la balance des contrats a combattu cette loi naturelle du commerce, qui veut que le retour des exportations se fasse, au mieux des intérêts du marchand, soit en monnaie, soit en marchandises, soit en lettres de change[2]. De tel ou tel pays, en effet, on n’a pas nécessairement un retour en marchandises, et souvent ce sont celles d’une tierce puissance qui, avec un transport momentané d’espèces ou avec lettres de change prises et cédées, fournissent le chargement que l’on ramène. À plus forte raison ne peut-on pas résoudre que toute sortie de monnaie soit un appauvrissement du pays : son enrichissement peut aussi en résulter[3]. Mais j’avoue que cette partie du livre étonne un peu, tellement elle renverse les idées communément reçues sur le mercantilisme. Comment donc un pays s’enrichirait-il à exporter de la monnaie ? C’est que l’enrichissement du pays, suivant Mun, ne saurait avoir d’autre cause que l’excédent de la valeur des marchandises nationales exportées sur la valeur des marchandises étrangères importées et consommées par nous ; or, rigoureusement parlant, une sortie de numéraire n’empêche aucunement que cet excédent n’existe dans la réalité des faits : car la monnaie qui sort peut fort bien servir à des échanges entre tierces puissances, échanges dans lesquels une part certaine de profits sera pour les navires anglais qui les auront faits. Si l’on a de la monnaie, il faut précisément la faire fructifier : et le commerce, soit entre l’Angleterre et l’étranger, soit entre puissances étrangères, est un de ces moyens. Quand on a les marchandises, on trouve toujours l’argent : il n’est pas toujours aussi

  1. Op. cit., ch. XIII.
  2. Op. cit., p. 75.
  3. Op. cit., ch. IV.