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Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/17

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dont l’étude, comme celle du calorique et de la pesanteur, pouvait être commencée sans les découvertes modernes et avec des procédés d’investigation beaucoup plus rudimentaires, fussent restées aussi prodigieusement en retard. Les considérations métaphysiques sur les quatre éléments suffisaient aux anciens ; longtemps aussi les spéculations sur la matière et la forme ont suffi à des générations un peu plus rapprochées de nous. Au milieu de cette direction générale des esprits, si l’on avait admis en principe qu’il existât des lois économiques naturelles et si l’on avait entrepris de les définir, elles n’auraient pu être étudiées que par la méthode déductive : or, celle-ci, appliquée à la science des richesses, ouvre trop facilement la voie aux formules aprioristiques et n’a rien produit toutes les fois qu’on ne l’a pas aidée et soutenue par la méthode inductive.

Une cause différente a été assignée à cette apparition si tardive de l’économie politique. « Il faut, a-t-il été dit, que le spectateur ait été préparé pour son travail et qu’il soit armé des instruments de recherche appropriés ; il faut qu’il ait cultivé préalablement les sciences plus simples capables de lui fournir les points de doctrine nécessaires et les méthodes convenables d’investigation. » Et M. Ingram, que nous citons ici, argumente à ce propos du développement tardif de la physique, de la biologie et des mathématiques[1].

Nous n’oserions souscrire à ce jugement. La physique et la biologie, récentes il est vrai, se sont bornées à inspirer la sociologie évolutionniste et positiviste sans alimenter l’économie politique proprement dite ; quant aux mathématiques, non seulement elles étaient arrivées, avec Descartes et Newton, à un développement plus que suffisant pour faire naître l’économie politique, si celle-ci avait eu besoin d’elles pour éclore, mais encore jusqu’à ce jour elles

  1. Ingram, Histoire de l’économie politique, tr. fr., p. 11.