Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/171

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l’on voit tant de terres devenues incultes, la plupart même de celles qui sont cultivées ne l’être qu’à demi, tant de peuples qui ont disparu des campagnes, tant de bourgs et villages détruits ou qui tombent en ruines tous les jours, une infinité de gens réduits à déserter leurs foyers et à périr de misère, pendant qu’il y aurait moyen de les faire vivre tous en les occupant, n’est-il pas concluant qu’il faut que l’agriculture soit prodigieusement tombée depuis cinquante ans seulement et qu’il y ait dans la police des blés quelque vice radical, funeste à l’agriculture et à l’industrie[1] ? »

Ces détails historiques — un peu longs peut-être — nous ont semblé nécessaires pour expliquer le point de vue ; où les physiocrates se sont placés et pour donner la raison de l’orientation particulière vers laquelle l’économie politique allait d’abord se tourner.

La grande école à laquelle nous arrivons enfin, se subdivise en deux groupes : 1° celui des « économistes » proprement dits ou physiocrates, véritable secte de Quesnay, qui comprenait Quesnay, Mirabeau le père, Mercier de la Rivière, Le Trosne, Baudeau, Dupont (de Nemours), Abeille, de Saiht-Péravy, Vauvillers, Roubaud, etc. ; 2° le groupe de Gournay, qui comprenait au premier rang Gournay et Turgot, puis derrière eux Morellet, Trudaine de Montigny, Malesherbes, Herbert, Bertin, Maynon d’Invau, de Boisgelin, de Cicé, Dangeuil, Clicquot-Blervache, etc.

Nous étudierons dans cet ordre :

1° L’historique général de l’école ;

2° Les principes généraux sur lesquels elle repose ;

3° Les principaux de ses membres.

  1. Cité par Dupont de Nemours, Analyse historique de la législation des grains, pp. 10 et 12 (voyez Afanassiev, op. cit., p. 203). Daire classe cet ouvrage — l’Analyse historique (parue en 1789) — parmi ceux qui ne peuvent pas être attribués sûrement à Dupont. — À étudier aussi, sur cette page intéressante de notre histoire économique, l’excellent ouvrage de Kareiew, les Paysans et la question paysanne en France dans le dernier quart du XVIIIe siècle, tr. fr., Paris, 1899.