Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/206

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le domaine du commerce international. Bien plus, il traduisit l’ouvrage déjà cité de Child[1], où se trouvait la formule essentielle du système de la balance du commerce, et bien loin de la critiquer quelque-part, il faisait observer que les deux ouvrages de Child et de Culpeper contiennent, de l’aveu des nations les plus commerçantes, les meilleurs principes que l’on connaisse en fait de commerce[2] ».

Chez Quesnay lui-même, on pourrait relever çà et là quelques formules qui seraient à première vue favorables à la théorie de la balance du commerce et notamment celle-ci : « Plus un royaume peut se procurer de richesses en argent, plus il est puissant et plus les facultés des particuliers sont étendues, parce que l’argent est la seule richesse qui puisse se prêter à tous les usages et décider de la force des nations relativement les unes aux autres[3] ».

Mais l’hostilité profonde que les derniers des mercantilistes, comme Forbonnais, témoignaient aux physiocrates, et la place insignifiante ou nulle que les physiocrates firent à une étude de la monnaie, montrent bien qu’une profonde distance séparait la nouvelle école de toutes celles qui l’avaient précédée.

C’est que la monnaie, pour les physiocrates, n’est plus ni la richesse, ni le signe même de la richesse ; elle est simplement un instrument nécessaire de l’échange, dont l’abondance dictera ce prix élevé des denrées agricoles qu’ils regardent comme la condition indispensable ou unique du relèvement et de la prospérité de l’agriculture. Le Trosne dit expressément : « On ne doit jamais s’inquiéter de l’argent, il y en a toujours assez… On peut suppléer à l’argent, mais rien ne peut suppléer aux productions[4]. »

  1. Voyez supra, pp. 129 et s.
  2. Op. cit., 1754, dans l’Avertissement, p. XI-XIII.
  3. Article Grains, pp. 246 de l’édit. Oncken. — Voyez aussi Questions intéressantes sur la population, édition Oncken, pp. 299-300.
  4. Intérêt social, ch. V, édition Daire, p. 915.