Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/239

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il n’a rien de commun avec les revenus qu’un propriétaire retire de sa terre sans risque et sans travail. » Et la conséquence, c’est que Turgot, en vrai physiocrate qu’il restait, regardait comme « contraire aux vrais principes en matière d’imposition, de charger l’exploitation des mines d’aucune taxe[1] ».

Turgot professe également que, « le laboureur fournissant à tous… leurs aliments et de plus la matière de presque tous leurs ouvrages…, ce n’est pas ici une primauté d’honneur ou de dignité, mais de nécessité physique[2] ». Cependant ces derniers mots semblent indiquer déjà que Turgot est prêt à plaider les circonstances atténuantes pour le système de son école. Voilà pourquoi le « capital » et les « capitaux » tiennent une place considérable dans ses Réflexions sur la formation et la distribution des richesses ; voilà pourquoi la classe « stérile » des premiers économistes devient avec lui la classe « stipendiée » ; voilà aussi pourquoi la classe « propriétaire » de Quesnay devient ici la classe « disponible[3] », afin que Turgot puisse y faire entrer, à côté des propriétaires fonciers, les capitalistes qui prêtent de l’argent à l’industrie[4]. Il peut, d’ailleurs, « exister d’autre revenu que le produit net des terres et que ce soit encore la terre qui a fourni tous les capitaux qui forment la masse de toutes les avances de la culture et du commerce[5] ».

Cependant, et malgré cette théorie du produit net, Turgot ne se gêne point pour critiquer la méthode de calcul appliquée par le Tableau économique[6].

On peut noter par ailleurs de graves divergences de

  1. Turgot, Mémoire sur les mines et carrières, ch. II, § 18, éd. Guillaumin, t. II, pp. 163-164. — Voyez Pervinquière, Contribution à l’étude de la notion de productivité dans la physiocratie, 1906, pp. 96-97.
  2. Réflexions sur la formation et la distribution des richesses, § 5.
  3. Op. cit., § 15.
  4. Op. cit., § 93.
  5. Ibid., § 99.
  6. Observations sur le mémoire de M. de Saint-Péravy (Œuvres, t. I, pp. 419 et s.).