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rente, que Smith, toutefois, ne sépare pas du fermage[1] ; enfin, on y rencontre la confusion entre le loyer ou intérêt d’une part et le profit de l’autre, autrement dit entre le capitaliste et l’entrepreneur[2], confusion qui se perpétuera, surtout chez les économistes anglais, pendant plusieurs générations après Smith. Ce chapitre est un de ceux où les divisions et les définitions peuvent paraître le moins nettes et le moins exactes[3]. Vient ensuite la théorie du « prix naturel », que J.-B. Say va appeler les « frais de production » : ce prix naturel, pour Adam Smith, est « le plus bas qu’on puisse accepter pour un temps considérable de suite[4] ». En termes différents, c’est donc la formule du « producteur le moins favorisé » de Ricardo[5].

Ainsi amené, et pour ainsi dire d’une manière incidente, sur le terrain de la répartition, Smith va épuiser les sujets qui s’y rattachent, avec sa division tripartite des salaires, des profits et de la rente[6].

  1. Loc. cit., p. 68.
  2. Ibid., p. 66.
  3. Voici, par exemple, la répartition du prix du blé et l’ordre dans lequel Smith la propose : « Dans le prix du blé, dit-il, une partie paie la rente du propriétaire ; une autre paie les salaires ou l’entretien des ouvriers, ainsi que des bêtes de labour et de charroi employées à produire le blé, et la troisième paie le profit du fermier » (Loc. cit., p. 68). — Aujourd’hui nous ferions les parts suivantes et nous les ferions dans l’ordre suivant : 1° amortissement du capital circulant (semences) et du capital fixe (usure du matériel et du bétail), par le motif qu’il n’y a produit que par l’excédent des richesses nouvelles sur les richesses nécessairement consommées dans l’œuvre de la production ; 2° salaire des manœuvres ; 3° loyer net du capital fixe qui est fourni par le propriétaire foncier ; 4° rente foncière du propriétaire, si l’on admet en droit ce titre de répartition et si le prix de ferme n’est pas déjà absorbé en entier par le 3° qui précède ; 5°loyer net et intérêt des capitaux fixes et circulants que le fermier peut avoir consacrés ; 5° profit pour le fermier, en comprenant dans ce profit son salaire implicite ou de direction. Nous plaçons ces paris dans cet ordre, parce que c’est celui où elles défailliront si le produit brut total est insuffisant à les toutes satisfaire. Cependant, pour que le fermier eût un loyer et intérêt de ses capitaux et un profit d’entreprise, le propriétaire pourrait avoir consenti un prix de ferme qui exclût toute rente foncière : c’est même ce que nous croyons actuellement le plus probable et de beaucoup le plus général.
  4. Loc. cit., p. 81.
  5. Voyez nos Éléments d’économie politique, 2e édit., p. 493.
  6. Ch. VIII ; — ch. IX-X ; — ch. XI.