Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/274

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et avec tout le système purement chrématistique de ses successeurs et disciples. En finissant, signalons dans ce chapitre une bonne et fine analyse des causes de l’inégalité des divers salaires comparés les uns aux autres.

Les deux chapitres qui suivent, « des profits du capital » et « des salaires et des profits dans les divers emplois du travail et du capital », sont inférieurs au précédent. Le terme « profits du capital » est un de ceux que les économistes plus récents ont le plus justement répudiés ; et Smith, qui a tant ajouté à Turgot, aurait pu, au contraire, trouver dans celui-ci le germe assez visible de la distinction entre le loyer ou intérêt du capital et le profit de l’entreprise[1].

Vient ensuite l’étude de la rente, que Smith, comme nous savons déjà, confond avec le fermage, quoiqu’il admette qu’une certaine partie de ce fermage puisse être accidentellement du profit ou intérêt de capital. Mais pour lui la rente, c’est-à-dire le fermage, est avant tout et essentiellement le prix de monopole que le propriétaire se fait donner pour la jouissance de la terre, prix aussi élevé que possible et le plus fort que le propriétaire puisse percevoir sans mettre en perte le fermier[2]. Ailleurs, pour-

  1. Turgot, Réflexions sur la formation et la distribution des richesses, § 86.
  2. « Cette part (c’est-à-dire celle que le propriétaire laisse au fermier pour remplacer le capital qui fournit là semence ; paie le travail, etc.) est évidemment la plus petite dont le fermier puisse se contenter sans être en perte… On pourrait se figurer que la rente de la terre n’est autre chose, souvent, qu’un profit ou un intérêt raisonnable du capital que le propriétaire a employé à l’amélioration de la terre. Sans doute il y a des circonstances où le fermage pourrait être regardé en partie comme tel ; car il ne peut presque jamais arriver que cela ait lieu pour plus que pour une partie. Le propriétaire exige une rente même pour la terre non améliorée (et Smith en donne un peu plus bas un exemple tiré de la récolte d’une plante sauvage dite salicorne) ; et ce qu’on pourrait supposer être intérêt ou profit des dépenses d’amélioration, n’est en général qu’une addition à une rente primitive. D’ailleurs, ces améliorations ne sont pas toujours faites avec les fonds du propriétaire, mais quelquefois avec ceux des fermiers » (Richesse des nations, 1. I, ch. IX, t. I, pp. 187-188). — Sur cette question, voyez nos Éléments d’économie politique, 2e éd. ; pp. 504 et s.