Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/360

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serait donc, sur ce point au moins, une réaction vers une des pires conséquences de l’esclavage, sous cette condition — nouvelle il est vrai — que le maître devrait ne se servir de sa puissance dominicale que dans un esprit de prévoyance malthusienne et de philanthropie.

Sismondi, qui est un adversaire de Malthus dans la théorie[1], en est donc bien plus qu’un disciple dans la pratique. Comment cela ? Le voici.

L’économie politique, selon lui, est un art, non une science, et un art de gouvernement, puisqu’il la définit « la recherche des moyens par lesquels le plus grand nombre d’hommes, dans un état donné, peut participer au plus haut degré de bien-être physique qui dépende du gouvernement[2] ». Or, il y a un certain rapport entre la population et les conditions de la richesse, pour que le maximum de bonheur soit atteint par le maximum d’individus[3]. Malgré cela les hommes et surtout les plus misérables d’entre eux ont une tendance à prolifier au dessus de la limite qui est commandée par ces maxima : en effet, « il n’y a jamais que la misère qui arrête la multiplication de l’espèce humaine[4] ». Cela étant, s’il est vrai que « la multiplication de l’espèce dépend de la volonté et que c’est dans cette volonté qu’elle a ses bornes[5] », par ailleurs « la population se réglera uniquement sur le revenu ; et si elle dépasse cette proportion, c’est toujours lorsque les pères se sont trompés sur ce qu’ils croyaient être leur revenu, ou plutôt lorsque la société les a trompés[6]. »

De ce côté là, l’avènement de la grande industrie a donc

    ch. viii, § 4 (8e édition, 1876, p. 404). — Sismondi fit disparaître ce passage dans l’édition de 1827. — Voyez nos Éléments d’économie politique, 2e éd., p. 541.

  1. Nouveaux principes, 1. VII, ch. ii, t. II, pp. 270-271.
  2. L. VII, ch. i, t. II, p. 250.
  3. Nouveaux principes, Avertissement sur la 2e édition, t. I, p. xi.
  4. Ibid., 1. Il, ch. v, t. I, p. 108.
  5. Ibid., 1. VII, ch. i, t. II, p. 252.
  6. Ibid., p. 254.