Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/364

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« Le dépositaire du pouvoir de la société, dit-il, est appelé à seconder l’œuvre de la Providence, à augmenter la masse du bonheur sur la terre et à n’encourager la multiplication des hommes qui vivent sous ses lois, qu’autant qu’il peut augmenter pour eux les chances de félicité[1]… Nous regardons le gouvernement comme devant être le protecteur dû faible contre le fort, le défenseur de celui qui ne peut point se défendre par lui-même et le représentant permanent, mais calme, de tous contre l’intérêt temporaire, mais passionné de chacun[2]… Je ne demande que les moyens lents et indirects de la législation, que l’exécution d’une justice complète entre le maître et l’ouvrier, qui fasse peser sur le premier toute la responsabilité du mal qu’il fait au second[3]. »

Le disciple le plus direct de Sismondi fut Buret (1811-1842), auteur de la Misère des classes laborieuses en France et en Angleterre (1842). Mais Buret va beaucoup plus loin que Sismondi. Partisan du droit éminent de l’État et du droit social qui se superposerait aux droits privés, il croit que l’État pourrait reprendre les biens au décès des propriétaires et que, sans aller pratiquement jusque là pour des motifs d’opportunité, il devrait au moins limiter les successions, en ce qui concerne, soit le montant des parts héréditaires, soit les degrés successibles de parenté. Dans la production industrielle, il faudrait des conseils du travail pour arrêter le taux des salaires et pour circonscrire la production d’après les besoins du marché. On voit donc, que, sauf le maintien de la propriété individuelle sous la condition de son morcellement, Buret adopte les conclusions du socialisme.

Par contre, dans un ordre d’idées assez analogue à celui de Sismondi, mais très éloigné de celui de Buret, le comte de Villeneuve-Bargemont avait essayé d’introduire

  1. L. I, ch. ii, t. I, p. 9.
  2. L. I, ch. vii, t. I, p. 52.
  3. L. VII, ch.ix, t. II, p. 366.