Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/415

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naie, étant une marchandise comme une autre, obéit comme une autre à la loi de comparaison des valeurs relatives et que, à supposer qu’elle soit exportée au début des opérations commerciales, bientôt la raréfaction en élèvera la valeur par rapport aux autres marchandises du même pays, à tel point que la quantité restante, retenue par cette inversion des rapports, ne puisse plus émigrer[1]. Voilà pourquoi, dirons-nous, si la loi faussement dite de Gresham peut dépouiller un pays de toute sa bonne monnaie en présence d’une mauvaise, le défaut d’équilibre commercial manifesté par la tension considérable du change n’y parvient jamais, s’il n’y a pas, à côté de la monnaie métallique franche, une monnaie dépréciée ou fictive qui permette à la loi de Gresham de s’appliquer. La monnaie, dit Bastable, est ainsi « employée comme un agent prêt à remédier à toute rupture dans l’équation ; des demandes internationales » : autrement dit, elle est un instrument qui s’ajuste de lui-même aux conditions dans lesquelles il doit servir[2]. De faibles quantités de métaux précieux, entrant dans le pays ou bien en sortant, suffisent à compenser des écarts qui, considérables en apparence, sont déjà beaucoup atténués et presque détruits par les taux de l’échange international, et c’est ainsi que « la circulation internationale de la monnaie figure pour des sommes minimes dans la valeur totale des échanges[3] ».

« Chaque pays, disait Ricardo, ne possède que la quantité de numéraire nécessaire pour régler les opérations d’un commerce avantageux d’échanges… L’or et l’argent ayant été choisis comme agents de la circulation, la concurrence du commerce les distribue parmi les différentes nations du monde dans des proportions qui s’accommodent au trafic naturel qui aurait eu lieu si de tels métaux

  1. Bastable, Théorie du commerce international, tr. fr., pp. 72 et s.
  2. Bastable, loc. cit.
  3. Fontana-Russo, Politique commerciale, tr. fr., p. 110.