Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/480

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Adam Smith l’avait fait, cette valeur d’usage avec la simple utilité, ou qu’il faille, comme la plupart de ses successeurs, cesser de la nommer[1]. Il est parfaitement vrai, en effet, que dans l’évaluation de mes immeubles au point de vue de l’assurance contre l’incendie et au point de vue du paiement de l’indemnité pour sinistres, je fais justement constater une valeur d’usage qui n’a aucun rapport avec la valeur d’échange, ni avec le, prix. Ce contraste est frappant, entre autres cas, pour les bâtiments d’un domaine rural, lesquels ont facilement une valeur d’usage quintuple de leur valeur d’échange : il l’est également pour des objets auxquels nous tenons par un-intérêt d’affection, comme des portraits de famille ; nous donnerions beaucoup pour ne pas en être privés, mais souvent nous ne trouverions personne qui voulût donner quelque chose pour les avoir, si peu que ce fût.

Nous aimons surtout à reconnaître chez M. Paul Leroy-Baulieu l’hommage intelligent qu’il rend au droit naturel et sa défense énergique de la propriété, sur le double fondement du droit naturel et de l’utilité sociale[2].

  1. « La valeur d’usage est l’importance qu’une personne attache à la possession d’un objet déterminé, et elle représente la quantité d’autres objets qu’elle serait disposée à abandonner pour l’acquisition de l’objet précis qu’elle a en vue : elle est absolument subjective. La valeur en échange est la faculté qu’a réellement un objet de s’échanger contre une certaine quantité d’autres objets : elle comporte le concours d’au moins deux volontés et renferme en général un élément objectif » (Op. cit., 2e éd., t. III, p. 24).
  2. « Il ne faut pas confondre, dit-il, ces deux idées distinctes : la garantie de la loi et la création par la loi… La loi ne crée aucun droit ; elle sanctionne et définit les droits existants ; ceux-ci naissent spontanément. La loi n’est jamais antérieure à un droit ; elle lui est toujours postérieure, de même que l’a grammaire, le dictionnaire et la syntaxe sont postérieurs au langage  » (Traité théorique et pratique, t. I, pp. 546-547). — Et ailleurs : « La propriété, dit-il, est un fait instinctif antérieur à la réflexion, comme tout ce qui est essentiel à l’homme, comme le langage, comme la constitution des sociétés, comme l’établissement de la famille et de la patrie… Ce sont les lois de la matière, aussi bien que les lois de l’esprit humain, qui imposent la propriété comme le mode le seul efficace et le seul praticable de l’exploitation du globe… La propriété ne confère pas au propriétaire la plénitude du résultat utile de la chose sur laquelle elle porte ; elle ne lui en attribue qu’une partie et en général une faible partie. Dans les fruits de