Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/529

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2° Le régime du partage forcé, dans lequel les parts de chaque enfant sont égales ou à peu près égales. Ce régime existait jadis dans les populations rurales du centre de la France, où les mauvais effets en étaient paralysés par la force traditionnelle des institutions domestiques de ces temps passés. Il a été imposé à la France, d’une manière générale, d’abord par la Convention, qui voyait en lui, concurremment avec d’autres moyens, un procédé pour détruire l’autorité paternelle et les traditions sociales ; ensuite par le Code civil de Napoléon Ier, qui, en mettant ce régime en contraste avec celui des majorats, se proposait de diminuer les familles hostiles ou indifférentes à la dynastie nouvelle et de grandir au contraire les familles amies. Le partage forcé est funeste à l’autorité paternelle, parce qu’il dépouille cette magistrature domestique de la sanction la plus efficace qu’elle aurait pu avoir : il est funeste à la fécondité des mariages, parce que le désir des parents de laisser un enfant qui maintienne leur rang social et qui puisse conserver l’atelier de famille, les pousse à n’en avoir qu’un, deux au plus — seul moyen effectif d’assurer leur volonté ; — il est funeste, enfin, à la stabilité des foyers, parce que, si les enfants dépassent ce nombre, l’impossibilité où se trouve chacun d’entre eux de conserver le foyer familial, provoque une licitation par laquelle arrivent des étrangers ;

3° Le régime de la liberté testamentaire, caractérisé par une quotité disponible qui ne soit jamais inférieure à la moitié du patrimoine. Ce régime existe en Allemagne et en Italie avec une quotité disponible égale à la moitié : en Angleterre, aux États-Unis et au Canada, avec une quotité disponible totale. Les avantages de ce dernier système sont également le contraire des inconvénients du partage forcé ; et c’est celui qui a toutes les préférences de Le Play et de son école[1].

  1. Réforme sociale, ch. ii, §§ 18-21.