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chaient à l’Eglise de n’avoir pas nié généralement la productivité du capital au temps où elle interdisait l’intérêt de l’argent[1].

Telle est, dans ses lignes essentielles, l’œuvre du grand prophète du collectivisme. Les disciples ne manquèrent pas autour de lui. Nous nous bornons à citer son meilleur ami, Engels, né à Barmen, mais industriel à Manchester et retiré ensuite à Londres, qui continua la publication du Capital ; Kautsky ; puis Bebel, député au Reichstag, auteur, entre autres ouvrages, de Die Frau und der Socialismus, livre profondément immoral où il prêche l’émancipation de la femme et son égalité avec l’homme sur le terrain de l’union libre et passagère.

Ce livre eut un immense succès. Bebel y traite notamment la question de la population : il y affirme que « ce sont les institutions sociales, c’est-à-dire les modes actuels de production et de répartition des produits — mais non pas le nombre des hommes — qui engendrent la misère… Il n’y a pas manque de moyens de vivre ; il y en a, au contraire, un excès comme il y a un excès de produits industriels. Au surplus, ajoute-t-il, l’idée de Karl Marx, que chaque période économique de développement a sa loi particulière de la population, se vérifiera pleinement sous l’empire du socialisme. » C’est que la félicité procurée par l’avènement de ce socialisme, jointe à l’ennoblissement des âmes qui en sera la conséquence, aura suffi pour transformer les passions de l’humanité. « Le genre humain, dit Bebel, marche, actuellement à l’aventure, dans l’ignorance des lois naturelles, tandis que dans la société nouvelle il agira avec un ordre parfait et dans la pleine connaissance des lois de son développement[2]. » Le socialisme mènera de front l’affranchissement de l’ouvrier et l’affranchissement de la femme, ces deux victimes des préjugés et

  1. Voir plus haut, p. 60.
  2. Die Frau und der Socialismus, 28e édition, Stuttgart, 1897, pp. 457-463.