Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/727

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

droits égaux à tous égards-à ceux des hommes[1] ». Le saint-simonisme sacrifie trop la liberté, qui est « le besoin le plus impérieux des êtres humains[2] ». Quant au fouriérisme, il n’y a que des éloges à lui décerner. « Ce système, dit Mill, ne fait violence à aucune des lois générales qui exercent leur influence sur l’activité humaine… Il y aurait une extrême témérité à prononcer qu’il ne peut pas réussir ou qu’il est impropre à réaliser la plupart des espérances que ses partisans fondent sur lui[3]. »

Dans son Autobiographie, Stuart Mill s’exprime plus nettement s’il est possible. Il explique que ses vues se sont modifiées et qu’on doit voir en lui un socialiste résolu. Jadis, dit-il, il se contentait de demander qu’on atténuât les inégalités, en supprimant (dans la législation anglaise) le droit d’aînesse et les fidéicommis. Mais cela ne lui suffit plus maintenant, et il rêve d’un temps où il n’y aura plus d’oisifs et où la répartition des produits du travail, ne dépendra plus du hasard de la naissance. Le problème social que l’avenir doit résoudre, sera d’unir la plus grande liberté individuelle du commercé avec la propriété commune de la matière première et avec la participation égale de tous aux fruits du travail combiné[4].

À la fin, Stuart Mill entreprit une croisade pour faire donner à l’État l’unearned increment (la plus-value non gagnée de la terre) ou du moins les accroissements qui devaient s’en produire à l’avenir[5]. Or, il ne doutait point de ces accroissements, étant donnée l’importance qu’il avait accordée à la loi du rendement non proportionnel en agriculture. D’ailleurs, en tout cela, il ne faisait que reproduire les propositions de son père James Mill[6].

  1. Ibid., p. 246.
  2. Ibid., p. 245.
  3. Ibid., p. 252.
  4. Sur le socialisme de Stuart Mill dans l’Autobiographie, voyez le Handbuch des Socialismus de Stegmann et Hugo, v° Mill, p. 516.
  5. Voyez nos Éléments d’économie politique, 2° édit., p. 496.
  6. Voyez plus bas, p. 741.