et lui organisa un cortège triomphal, qui traversa l’Allemagne aux acclamations de la foule.
On doit à Lassalle la formule de la loi d’airain — das eiserne ou das geherne Gesetz — loi du salaire nécessaire, déduite d’un rapprochement entre la loi de l’offre et de la demande, appliquée au salaire, et la loi qui pousse la population à augmenter jusqu’à la limite extrême de la faculté de vivre[1]. — Cependant Lassalle contredisait quelque peu sa thèse lorsqu’il reconnaissait, dans l’Offenes Antwortschreiben lui-même, qu’il y avait eu depuis un siècle, parmi les travailleurs, une amélioration absolue des conditions de l’existence. Or, bien que cette amélioration, à l’en croire, eût été relativement moins considérable pour eux que pour les autres classes de la société (ce qui est faux ou pour le moins très douteux), le simple énoncé du changement indiquait assez que la loi du salaire nécessaire ne s’était pas vérifiée. Donc elle était fausse. Même le monde socialiste renonce à la défendre[2], entre autres motifs, d’ailleurs, parce que, si elle était exacte, elle serait fatale et que la lutte contre elle ne devrait pas aboutir, ce qui rendrait inutiles les grèves et toute l’agitation des syndicats ouvriers.
Lassalle avait sur la valeur et sur la richesse des idées qui se rattachaient de près à celles que Karl Marx avait émises dans sa Critique de l’économie politique. Quant à son procédé de transformation sociale, celui-ci consistait dans la création progressive d’associations coopératives de production, Produktivassociationen, que l’État subventionnerait et qui prépareraient les voies à un régime collectiviste. La constitution de ces sociétés n’est pas le terme, elle n’est qu’un procédé pour y parvenir. Lassalle
- ↑ Voyez nos Éléments d’économie politique, 2e édit., p. 520.
- ↑ « Lassalle, plus agitateur qu’économiste, dit Lafargue, la formule pour les besoins de sa propagande » (Note de Paul Lafargue sur le Capital de Marx, reproduite dans le Capital de la petite édition Guillaumin, pp. 172-173). — Voyez aussi Deville, Principes socialistes, Paris, 1896, pp. 128-129 ; — Jaurès, Revue socialiste, mars 1900, pp. 263-264.