lui-même la présente comme « le moyen transitoire le plus modéré, le plus facile », comme le « grain organique de sénevé dont la vitalité irrésistible se développe d’elle-même[1] ». C’était donc, au moins pour la période de transition, du socialisme sociétaire à la manière de Louis Blanc[2]. Lassalle calculait qu’une centaine de millions de thalers (375 millions de francs) aurait suffi pour la transformation ouvrière de l’Allemagne, puisque chaque société coopérative devait se suffire et même prospérer, une fois franchies les difficultés du début[3].
Tel est le remède, et il ne faut voir que des palliatifs insuffisants, éternisant peut-être le mal, dans toutes les institutions qui ont été imaginées pour remédier à ce mal. Les caisses d’épargne, de secours ou de retraites, même les banques populaires Schulze-Delitsch, à supposer qu’elles puissent améliorer le sort de quelques individus, ne peuvent pas améliorer la condition générale ; les banques Schulze-Delitsch, en particulier, rendent moins de services aux ouvriers proprement dits qu’aux petits négociants et aux artisans autonomes. Quant à la société coopérative de consommation, elle permet plutôt aux patrons d’abaisser les salaires, puisqu’elle abaisse pour les ouvriers le coût de la vie. Il n’y a donc d’espoir que dans la société coopérative de production, subventionnée par l’État, et c’est aux ouvriers d’y arriver, au moyen d’une campagne activement conduite en faveur de l’établissement du suffrage universel direct.
Lassalle avait su inspirer une réelle sympathie à l’évêque de Mayence, Mgr de Ketteler. Dans son opuscule Die Arbeiterfrage und das Christenthum, paru l’année de la mort de Lassalle, Mgr de Ketteler, rallié sans réserve à la thèse économique du salaire nécessaire, préconisait