monde, la force des syndicats ouvriers, auxquels Menger ne pensait pas. Le marxisme, en un mot, a fait place au syndicalisme, et la théorie à la pratique, mais toujours avec la même ébauche de plan social.
Il faudrait cependant et tout d’abord que les socialistes se missent bien nettement d’accord sur le but à atteindre. Puisqu’il y a contradiction entre le principe du droit du travailleur au produit intégral et le principe du droit de tout homme à l’existence, c’est-à-dire à la satisfaction de ses besoins, il faudrait qu’ils optassent bien franchement pour l’une ou l’autre de ces formules. Or, ils ne l’ont pas fait.
C’est cette antinomie que nous voulons exposer ici[1].
Dans la théorie socialiste, le droit au produit intégral et le droit à l’existence, joints au droit au travail, forment avec celui-ci les droits innés, par opposition aux droits acquis. Ces derniers, ne sont que le produit postérieur et plus ou moins arbitraire des lois positives ; ils se sont constitués par une coutume qui, « faite de la domination accapareuse des uns et de l’asservissement résigné des autres est la forme spontanée du droit[2] ». À ce titre donc, il importe de refaire la philosophie du droit plus encore peut-être que l’économie politique : car « la philosophie du droit doit être considérée comme l’essence même du socialisme, malgré ce coloris économique qui prend une si grande extension, notamment chez les socialistes allemands (Rodbertus, Marx, Lassalle)[3] ».
Mais revenons aux droits innés.
Le premier de ces droits, je veux dire le droit au travail, n’est encore qu’un prolégomène et n’est point une solution. À qui appartiendra la richesse que le travailleur aura produite ? Assurément — répondent à l’unanimité
- ↑ Sur cette question voyez le chapitre que M. Maisonabe y consacre en entier, Doctrine socialiste, 1900, IIe partie, ch. iii, pp. 198-219.
- ↑ Ch. Andler, résumant A. Menger, Introduction au Droit au produit intégral, p. iv. — Item, A. Menger, op. cit., tr. fr., pp. 14 et s.
- ↑ A. Menger, op. cit., p. 57.
