Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/784

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moteurs, quoique avec d’heureuses différences entre eux, M. l’abbé Pottier, directeur du grand séminaire de Liège, et M. l’abbé Daëns, qui fut député d’Alost.

Soit l’autorité personnelle de M. l’abbé Pottier, soit les congrès tenus à Liège en 1887 et 1890 firent donner, même hors de Belgique, le nom d’école de Liège au groupe qui acceptait ces doctrines, tandis que le groupe catholique conservateur et libéral recevait le nom d’école d’Angers, à raison de l’influence directrice de l’évêque de cette ville, Mgr Freppel, et à cause du congrès des jurisconsultes catholiques qui s’y était réuni en 1890 sous la présidence de M. Lucien-Brun.

L’appellation « démocratie chrétienne » est plus récente : il serait difficile de la faire remonter au-delà de 1896[1]. Elle implique aussi certaines idées qui lui sont propres, notamment en politique. Ainsi, en soutenant qu’une

    une faculté d’exercer ce droit, le devoir de charité des uns entraîne au profit, soit de l’État, soit des intéressés, le droit de prendre ce qui aurait dû être donné. « Nous nous faisons volontiers, dit-il, à cette pensée qu’il faut, pour être obligé, avoir un créancier porteur d’un titre… Or, la justice naturelle, après avoir formulé comme un devoir la compensation du superflu des uns avec le nécessaire des autres, n’y fait pas, au cours normal des choses, correspondre un droit… Et si personne n’est constitué en titre, ni pour apprécier, ni pour exiger la compensation, c’est que tous les intéressés ont cette autorité et ce pouvoir » (Op. cit., pp. 28-29). Logiquement, comme le superflu des uns ne sera compensé avec le nécessaire des autres qu’après l’égalisation des jouissances, il s’ensuivrait que la masse intéressée à cette égalisation pourrait l’effectuer. M. de Ponthière conclut : « Le principe de la propriété, qui est d’ordre naturel, n’en reste pas moins sauf. Les conclusions disparaissent dans la mesure où elles s’enlèvent à elles-mêmes la justification dont elles ont besoin » (p. 45). Autrement dit, le titre reste : mais tout le monde a le droit d’en prendre l’émolument pour en jouir soi-même. C’est l’appel à l’anarchie.

  1. Nous avons vu cependant plus haut (p. 684) que les-socialistes de 1848 avaient l’appellation « démocratie chrétienne ». Mais après eux elle tomba en désuétude, et d’autant mieux que les catholiques, après 1850, se piquèrent moins d’être démocrates ou socialistes. Le R. P. Vermeersch (la Nouvelle Encyclique sociale, Bruxelles, 1901, pp. 7-9) rattache, pour la Belgique, l’appellation « démocratie chrétienne » aux débuts de la « Ligue démocratique belge » et au congrès catholique de Malines de 1891. « Elle est, dit-il, belge de naissance… Les démocrates chrétiens de France datent leurs origines du congrès de Reims, tenu en 1896’(congrès des prêtres, convoqué par M. l’abbé Lemire)… C’est aussi vers 1896 que des journaux italiens se mettent à parler de démocratie chrétienne » (Vermeersch, loc. cit.).