Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/790

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aux évêques des États-Unis, dans laquelle Léon XIII, contredisant les rêves de corporations obligatoires maîtresses absolues du travail, déclare que « personne ne doit empêcher qui que ce soit de donner son travail à qui il lui plaît et quand il lui plaît » ; 4° enfin et surtout l’Encyclique Graves de communi du 18 janvier 1901, qui restera l’un des textes les plus précis et les plus complets dirigés contre le socialisme chrétien.

« Il importe peu », dit ce dernier document, qu’on se serve du mot « démocratie chrétienne », Pourtant ce n’est que sous la condition absolue que ceux qui le prennent se conformeront fidèlement aux règles de cette même Encyclique. Or, là, non seulement la propriété est défendue à nouveau contre toutes les attaques, mais encore la question sociale est envisagée sous l’aspect d’une question morale ; la forme démocratique de la société et du gouvernement est présentée comme entièrement indifférente pour le bien ; les institutions anciennes sont exaltées à l’égal des nouvelles ; les classes riches et instruites sont montrées nécessaires à l’équilibre social et à la prospérité des œuvres ; la charité est célébrée comme une vertu de tous les temps et de tous les milieux ; et l’aumône même doit garder dans une société chrétienne toute la place que les générations passées lui avaient faite[1].

Après cela rien ne subsiste plus, ni des formules, ni des tendances que nous avons critiquées — rien, disons-le, sinon le mot « démocratie chrétienne », pourvu que celui-ci, dépouillant à la fois son sens précédent et son sens étymologique, se résigne à ne plus désigner que l’action bienfaisante du christianisme se manifestant comme elle l’a fait dans tous les siècles, c’est-à-dire par des institutions et des dévouements qui correspondent à la variété

  1. Voyez pour plus de détails sur cette analyse l’article que nous avons publié sous le titre l’Encyclique du 18 janvier 1901 et la démocratie chrétienne, dans la Revue catholique des Institutions et du Droit, n° de mai 1901.