Page:Rambert - Études littéraires, t1, 1890.djvu/162

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l’honneur qu’il revendique pour elles de passer les premières. On dirait un droit de préséance, comme ceux que réclame Saint-Simon. Où en seraient les écrivains, s’ils allaient dès aujourd’hui être tenus de faire défiler leurs arguments par rang de taille ? O Cicéron ! qu’est devenue ta rhétorique ?

Il y a plus ; j’ose croire que, dans le plan de Pascal développé par Etienne Périer, il y a une transition bien autrement saisissante que celle dont on nous parle aujourd’hui. Autour de son disciple, Pascal entasse ruines sur ruines ; il le plonge dans la plus profonde obscurité ; il se plaît à épaissir les ténèbres ; puis, quand l’attente et l’effroi sont au comble, quand l’homme est bien convaincu qu’en lui et autour de lui il n’y a que confusion, mystères, obscurités, au lieu de lui montrer brusquement le soleil, procédé dangereux, plus propre à éblouir qu’à éclairer, il lui fait voir dans la nuit qui l’entoure un point, un seul point lumineux, et c’est sur ce point unique que se concentrent aussitôt toute l’attention, toutes les espérances, toutes les inquiétudes. Que deviendra-t-il ? Est-ce un feu follet qui va s’éteindre ? Va-t-il subsister et grandir ? D’où vientil ? Est-ce bien le soleil ? Est-ce bien la lumière ?… Ceci est mieux qu’une transition ; c’est tout un drame. Comme les grands orateurs, Pascal, qui méprisait la poésie, est poëte. L’enchaînement logique le plus serré va lui fournir la matière d’une sorte de