Page:Rambert - Études littéraires, t1, 1890.djvu/218

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

a jamais suivi les événements de l’histoire d’une âme, en aura découvert qui semblent au premier abord inconciliables. Chacun porte deux hommes en soi. Celui qui veut n’est pas toujours celui qui fait. Cette contradiction est si grave que plusieurs systèmes ont été incapables de la surmonter. Les uns ont simplifié la difficulté en la niant, en retranchant, ce qui est toujours facile, un des éléments du problème. Les autres, plus sincères, mais non plus heureux, ont recouru à l’antique supposition du dualisme. Ils ont fait cohabiter dans le sein de l’homme deux principes ennemis, voués à une lutte éternelle, le principe du bien et le principe du mal.

L’esprit humain n’a pu se déclarer satisfait d’aucune de ces doctrines. D’une part l’évidence des faits l’a emporté sur l’apparente simplicité logique des systèmes exclusifs ; d’autre part, cet irrésistible besoin d’unité qui préside à tous les travaux de la pensée, et qui paraît être une des lois de notre entendement, a protesté contre toute doctrine dualiste, et cette protestation est au nombre de celles qui finissent toujours par triompher. C’est le propre du progrès de tendre à l’unité. En morale, soutenir une doctrine dualiste c’est poser la question sans la résoudre ; c’est faire aveu d’ignorance.

Aux yeux de la science, l’hypothèse de la chute a ce grand avantage que, sans rien retrancher des difficultés du problème, elle s’élève fort au-dessus