Page:Rambert - Études littéraires, t1, 1890.djvu/35

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la cène à ce peuple qui n’en était pas digne. Le 23 avril 1538, ils furent bannis de Genève. Farel se réfugia à Neuchâtel, Calvin à Strasbourg.

Mais cet exil devait servir au triomphe définitif de Calvin. Quand les Genevois eurent secoué le joug des réformateurs, ils se jetèrent dans la licence.

On releva les baptistères, dit Michel Rosat, on dansa, joua, ivrogna, paillarda, sous ombre des cérémonies bernoises ; on alla nud par les rues avec tamboureux et fifres.

Le culte même cessa. Deux ministres qui s’étaient montrés plus faciles sur la question des cérémonies, et qui étaient restés en fonctions après le départ de Calvin, quittèrent la ville, ne pouvant plus supporter une si honteuse dissolution. En même temps, par une réaction bien naturelle, les catholiques retrouvèrent quelque crédit. Le cardinal Sadolet jugeant le moment favorable pour arracher Genève à la réforme, écrivit au conseil et au peuple une lettre habile et caressante. Il n’y procédait point par subtiles, ardues et épineuses disputations, il parlait de la splendeur de l’église, du respect qui lui est dû, de l’humilité qui sied aux croyants, et rendait responsables ceux qui avaient trompé Genève par une fausse usurpation du nom de doctrine et sapience, de tous les malheurs de cette ville et du schisme de l’église :

Vérité est toujours une, dit-il, et mensonge est variable et divisé : La chose droite est simple, mais la tortue se fend en plusieurs parties.