tous les jours. Il semble à vous ouïr parler que ces règles de l’art soient les plus grands mystères du monde ; et cependant ce ne sont que quelques observations aisées que le bon sens a faites sur ce qui peut ôter le plaisir que l’on prend à ces sortes de poëmes, et le même bon sens qui a fait autrefois ces observations, les fait aisément tous les jours, sans le secours d’Horace et d’Aristote. Je voudrais bien savoir si la grande règle de toutes les règles n’est pas de plaire, et si une pièce de théâtre qui a attrapé son but, n’a pas suivi un bon chemin. Veut-on que tout un public s’abuse sur ces sortes de choses et que chacun ne soit pas juge du plaisir qu’il y prend ?
J’ai remarqué une chose de ces messieurs-là : c’est que ceux qui parlent le plus des règles et qui les savent mieux que les autres font des comédies que personne ne trouve belles.
Et c’est ce qui marque, madame, combien on doit s’arrêter peu à leurs disputes embarrassées… Car enfin si les pièces qui sont selon les règles ne plaisent pas, et que celles qui plaisent ne soient pas selon les régies, il faudrait, de nécessité, que les règles eussent été mal faites. Moquons-nous donc de cette chicane où ils veulent assujettir le goût public, et ne consultons dans une comédie que l’effet qu’elle fait sur nous. Laissons-nous aller de bonne foi aux choses qui nous prennent par les entrailles, et ne cherchons point de raisonnement pour nous empêcher d’avoir du plaisir.
Quand on lit cette scène pour la première fois, avant d’avoir fait son tour d’Allemagne, on la trouve spirituelle, mais on n’y attache pas grande impor-