Page:Rambert - Études littéraires, t1, 1890.djvu/88

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L’intelligence humaine, quelque puissante qu’on la suppose, a cependant ses bornes : elle ne peut rien connaître de ce qui n’a aucun rapport avec elle ; elle ne saisit que ce qui rentre dans le champ de sa portée, parce que c’est à cela seulement qu’elle peut appliquer sa mesure. Comprendre, c’est embrasser ; il n’y a qu’une intelligence infinie qui puisse embrasser l’iniîni. L’homme n’a point de faculté pour en juger. Tout ce qu’il sait, c’est que la sphère de son existence est peu de chose. Par delà s’ouvre un espace illimité, où il n’y a pour lui que ténèbres. On l’appelle l’infini par opposition à ce que nous pouvons connaître.

Cela est si vrai qu’aucune langue humaine n’a de paroles qui puissent s’appliquer à la divinité conçue en elle-même et dans l’intimité de son être. On ne peut en parler qu’à condition de tomber de non-sens en non-sens, de contradiction en contradiction. Que dirons-nous de l’absolu ? Dirons-nous qu’il est grand ? mais il n’est ni grand ni petit, parce qu’il n’a pas de mesure. Dirons-nous qu’il est bon ? mais il n’est ni bon ni méchant, parce qu’il n’est soumis à aucune loi. Tous les noms qu’on peut lui donner, l’infini, l’absolu, la substance. Dieu même, peu importe, tous ces noms ne sont justes que parce qu’ils impliquent la négation de notre faiblesse, ou laissent tout supposer.

Et qu’on n’espère pas trouver dans une révélation