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LA GRANDE PEUR

Et un petit point blanc marquait la place de sa main…

Maintenant, il avait beau regarder : il n’y avait plus rien là où elle s’était tenue. Comment est-ce qu’on peut comprendre ?

Il restait assis, il ne bougeait pas, il se demandait : « Où est-elle ? » c’était comme si elle avait été supprimée de la vie en même temps qu’elle l’était de sa vue.

Il n’a pas pu s’empêcher pourtant d’aller la chercher encore des yeux, il continuait d’aller la chercher au-dessous de lui ; mais ce qu’il a vu seulement, c’est que la nuit allait venir ; ce qu’il y avait seulement, où elle avait été, c’était une ligne grise sur le vide. Parce qu’elle n’est plus, rien n’est plus. Tout était vide, tout était désert, en même temps qu’il faisait froid et il faisait un grand silence.

Là-haut, quelques corneilles tournaient encore contre les parois avant de regagner les fissures du roc où elles nichent, et ont crié encore peut-être, mais avec des cris pas assez forts pour qu’ils pussent venir jusqu’ici, et venir à nous ; alors il n’y a plus eu que le bruit de l’eau qui ne compte pas ; il n’y a plus eu que le grand silence et que ce