Aller au contenu

Page:Rattazzi - Le piège aux maris, 1865.djvu/13

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cheminée, pas de feu ; sur la table, rien qui fît pressentir le repas, dont l’heure était cependant sonnée. Dans un des lits, – sous un drap qui semblait recouvrir un cadavre, tant il était rigide et tendu, – une femme, dont les lèvres blanches laissaient à peine passer le râle de l’agonie. – Sur un escabeau, tout auprès, un homme assis, la tête dans une main, l’autre main posée sur le lit, – dans une attitude immobile.

Cet homme pouvait avoir soixante ans. Il était de taille moyenne avec de larges et hautes épaules dans lesquelles rentrait le cou. Des cheveux gris très épais, emboîtaient son front qu’ils paraissaient rétrécir. Sa bouche aux coins durement arrêtés, semblait n’avoir jamais dû s’ouvrir qu’avec peine pour articuler un son. Son œil clair, abrité par d’énormes sourcils, exprimait en ce moment un désespoir farouche.

La femme qui était dans le lit et qui allait mourir, était-elle l’objet de ce désespoir ? – Oui, sans aucun doute, car c’était sur elle que se fixait obstinément le regard de l’homme.

Ce n’était pourtant pas sa femme ; il était vêtu comme le sont les riches fermiers, ou les